Simon | Odyssée#19 ~ Mieux vaut un stress intense suivi d'une camomille qu'un RDV chez l'ostéopathe
Intensité & quotidien ~ Premier article en freelance ~ Résidences ~ Les chercheurs de trésor ~ Ce qui ne te tue pas te rend plus fort ~ Ce qui ne vous tue pas me rend plus fort ~ Stress et camomille
Bienvenue sur Odyssée, mon carnet libre où je partage des notes sur la vie créative. Cette semaine : la méthode des romains pour faire des choix, comment profiter des erreurs des autres et le hack créatif de Rodin (et mon premier article dans un journal).
Salut l’équipe 🍋
Je vous présente mes meilleurs voeux ! Que puis-je vous souhaiter ? Au moins de l’amour, des phases ultra-intenses de création et beaucoup de repos.
Alterner entre intensité et pratique quotidienne
C’est une des leçons que je tire de 2021. Si pratiquer au quotidien fortifie les savoirs et rend la vie belle, c’est dans les phases de création ultra-intenses qu’on produit nos chefs-d’œuvre.
Je pense aux deux mois en résidence que j’ai passé à créer, en avril à Madrid — où j’ai publié S’extraire du travail pour mener la vie ludique (qui est le plus lu de mes 18 essais) ; et courant août en Géorgie — où j’ai animé le podcast Curiosités Vagabondes et pris confiance en moi à fréquenter d’autres créateurs et créatrices.
A l’instar de Rodin qui conçut son chef-d’oeuvre La Porte des Enfers et en tira ses œuvres suivantes, les artistes que nous admirons capitalisent sur leurs œuvres majeures.
Si les chefs-d’œuvre se façonnent petit-à-petit dans le silence de l’atelier par la progression qui émane de la pratique délibérée1; le geste, l’inspiration, la production d’un chef-d’œuvre, elle, se fait au prix d’une concentration intense et d’efforts prolongés. Rodin a passé trois ans à étudier La Divine Comédie et 10 ans à produire des petites sculptures, pour tester. Puis il a tout assemblé dans un grand geste2.
C’est ainsi que les comédiens préparent leurs pièces : ils écrivent, ré-écrivent, testent des parties de la pièce, puis ils partent en résidence. Ces mois, comme à Madrid ou en Géorgie, que j’appelle en résidence, sont de nouvelles techniques de soi à mon arsenal. A défaut de pouvoir partir un mois, je vous incite à passer des moments d’étude et de création coupés de tout, comme vous le propose Valentin Decker pour l’écriture3.
Aussi, je crois que notre vie créative dépend de ces moments prolongés et volontaires de dévouement. On y reviendra dans la prochaine édition, qui s’appuiera sur 3 textes formidables pour discuter du souci de soi, sous l’oeil du créateur :
L’herméneutique de soi, par Foucault
La tranquillité de l’âme, par Sénèque (notamment le chapitre 2)
Lettres à un jeune poète, par Rainer-Maria Rilke
Pour conclure sur Rodin, son anti-conformisme m’a marqué.
Surdoué à l’école (selon le récit), il refusa toute sa vie de produire ce qu’on attendait de lui — même lors des commandes publiques (la meilleure source de revenus pour un artiste à l’époque). Il eut sa première reconnaissance extérieure à 35. Entre-temps, il oeuvra comme artiste dans son atelier à partir de ses 24 ans, et comme artisan auprès d’un patron.
Il y apprit de multiples techniques qui, si de ses propres mots ne le « ravissaient pas », lui permirent de maîtriser l’ensemble de son art. Il s’en servit plus tard pour réaliser La Porte des Enfers et être l’un des artistes les plus remarquables de son époque. Je reviens sur l’importance de la maîtrise de l’ensemble du processus créatif dans l’article qui suit.
Mon premier article en freelance
En attendant de retourner en résidence, je suis fier de vous annoncer que j’ai publié mon premier article chez quelqu’un d’autre — en l’occurrence chez Welcome To The Jungle.
Ce papier approfondit cette logique des “résidences” qui, pour moi, signalent la recherche d’un nouveau mode de travail ET de vie pour les indépendants qui le peuvent, et qui le veulent (on est beaucoup). Si le coeur vous en dit, vous pouvez le lire ici :
Contre la vie de bureau, ces jeunes travaillent en "résidences créatives"
Alors que 30% des enfants “rêvent de devenir youtubeur” et que le sens au travail devient impératif, nous assistons à la plus grande évolution du travail depuis la révolution industrielle : une partie de la jeunesse diplômée rejette l’emploi, la carrière corporate et invente une nouvelle catégorie de travailleurs : les créateurs et créatrices.
Mini résidence, 2021 & 2022
En vérité, je viens de m’offrir une mini résidence de 10 jours en introspection, entre le Jura, San Sebastian et le fauteuil en velours de mon atelier.
En 2021, j’ai surtout quitté. J’ai quitté mon école de commerce, mon job et j’ai abandonné une idée fausse de ce que je pensais vouloir faire (qu’on trouve dans ma review 2020). Je me détache aussi de mon auto-censure et assume mes convictions, mes besoins et ma singularité. Pour l’heure, je vous épargne le post review annuelle pour vous partager quel type d’erreurs sont bénéfiques et pourquoi je me construis une vie intermittente.
S’inspirer des chercheurs de trésor pour mieux créer
Le 5 octobre 1804, 4 frégates anglaises bombardent la flotte ibérique. 40 minutes plus tard, les espagnols sont vaincus et leur navire phare, le Mercedes, épouse les fonds marins – avec dans sa cale un trésor de 500M$.
En 200 ans, aucun pirate ne le localise. Aucun, jusqu'à ce que Greg Stemm4 ne se mette sur le doss'. En 2007, Greg et son équipe du Black Swan Project analysèrent la zone où pourrait se trouver l'épave, puis la découpèrent en un quadrillage où plonger, chaque carré ayant sa probabilité de réussite.
Un carré après l'autre, les jours se succédèrent sans qu'ils ne trouvent rien – ce qui agaçait leurs investisseurs, voire les rendait dingue quand Greg leur disait dans les yeux :
"Chaque jour sans trouver est une bonne nouvelle, car cela nous rapproche du but. Ne pas trouver EST trouver"
Ce qu'il veut dire, c'est que ne pas trouver revient à obtenir une information : le trésor n'est pas sur cette case, donc nous pouvons la rayer et passer à la suivante. Ca semble trivial, mais cette méthode dite "d'essais-erreurs" est géniale (et à la base du processus de découverte scientifique). Elle consiste à tirer partie de ce qu'on ignore !
On peut le faire en tant que créatrices & créateurs :
Admettons que je veuille me faire découvrir de mes lecteurs en 100 posts linkedin. J'ai donc 100 chances. Un post, une tentative; comme un jour = une chance pour nos chercheurs de trésors. C'est notre zone quadrillée.
Le trésor (un 'buzz', 500 M$) se trouve sur 1 ou 2 des 100 cases.
Je dois donc trouver quelle est cette case. Soit, quel sera "le bon post". Je pourrais élaborer des théories sur le meilleur moyen d'y parvenir. Par exemple, me dire "je fais un format controverse sur un sujet populaire, ça va attirer du monde".
Le problème de cette méthode, c’est que je vais produire un Lit de Procuste : je vais prendre ce qui marche pour la partie visible des créateurs (les 5% pour qui ça marche) et essayer d’adapter leurs méthodes à moi. Ce qui est la recette du désastre.
Plutôt que de se perdre sur le chemin de la théorie, le meilleur moyen rationnel consiste à tout essayer sans théoriser, jusqu'à ce que ça fonctionne – au risque de n'avoir aucun résultat pendant 99 jours.
C'est ça, "l'essai-erreur" : ça consiste à trouver CE QUI NE MARCHE PAS. Trouver ce qui ne marche pas est plus important que de trouver ce qui fonctionne.
Pourquoi ? Car ne pas faire ce qui ne marche pas signifie que :
** Forcément, faire autre chose qu'une erreur VA marcher **
C'est ce que les romains appelaient leVia Negativa. Soit tester puis supprimer ce qui ne fonctionne pas. Si je ne publie pas de mauvais posts, de temps en temps, il y en aura un excellent. C’est inévitable.
Chercher à faire des petites erreurs pour en tirer partie me semble aussi plus sain émotionnellement qu'essayer que ça marche. On n'est moins investi, pas déçu et on ne peut qu'être content quand "CA MARCHE".
C’est ainsi que Nassim Taleb est devenu riche : en ne devenant pas pauvre pendant les crises financières (et même, en s’y enrichissant drastiquement).
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Cette histoire provient d’un post linkedin. Likez-le si vous avez aimé, c’est un bon moyen de me soutenir :)
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La méthode essai-erreur est rationnelle car elle délimite le périmètre où chercher. Comme la nature, elle procède par élimination et évite de refaire les mêmes erreurs. Car comme le dirait Nassim Taleb (oui je l’aime bien) :
“L’homme vertueux n’est pas celui qui n’a jamais fait le mal, mais plutôt celui qui ne l’a fait qu’une seule fois”5
Ce qui ne te tue pas te rend plus fort
Cet adage recèle une dose de sagesse. Il parle de l’antifragilité expliquée par Nassim (après trois citations en 2 minutes, on devient intime). Jusqu’à une certaine intensité, le mal renforce notre organisme :
Se muscler consiste à rompre les fibres musculaires qui se renforcent en se reconstituant pendant le repos ;
Manger des cailloux peut provoquer une sale indigestion, mais renforce notre système immunitaire (vous vous rappelez de Mithridate, le roi qui s’empoisonnait un peu tous les jours pour se prémunir d’un prétendant qui voudrait le tuer ?)
L’antifragilité est la Mithridatisation généralisée : l’organisme ou le système s’auto-raccommode; et le mal doit renforcer l’ensemble du système, pas seulement un seul élément — ici, sa résistance au poison.
L’antifragilité s’inscrit dans une triade fragilité — robustesse — antifragilité. Le fragile est ce qui se casse facilement (un verre) ; le robuste ce qui résiste et finit par se casser (une table) ; l’antifragile ce qui se renforce des chocs, comme la réputation d’un.e artiste.
Plus là-dessus dans Odyssée#2 ~ L’antifragilité du créateur
Sauf que nous sommes antifragiles jusqu’à un certain point.
Faire le buzz est bon pour notre visibilité, mais si vous êtes repris par la fachosphère, fin du game.
Pareil pour l’exercice : s’entraîner est bon pour votre corps, sauf si vous allez trop loin — il se cassera.
Donc, ce qui vous tue vous rend plus fort à condition que ça ne vous tue pas avant. Mais cette idée a une autre interprétation que je n’avais jamais entendu avant que Taleb ne me la soumette :
Ce qui ne me tue pas me rend plus fort, car ce qui ne me tue pas renforce les autres
** Donc ce qui ne tue pas les autres me renforce **
Si le Titanic n’avait pas coulé, on aurait continué à construire des bateaux encore plus grands — et la catastrophe aurait été encore plus dramatique.
La nature se fiche des individus (et jusqu’aux Lumières6, les systèmes politiques aussi). La nature pense à sa survie et sélectionne par la loi du survivant (a.k.a, aussi nommé en heuristique le “biais du survivant”).
Pourquoi dit-on que “le service militaire, c’était quand même bien, ça faisait des ‘vrais’ hommes”7 ou que ce membre de la mafia “a été endurci par son passage en prison sibérienne” ?
Nous pensons que passer par un événement difficile nous renforce pour le suivant (comme une rupture, un décès ou se voir voler sa dernière part de pizza dans son assiette par son amoureuse).
Nous pensons ça car nous ne voyons que ceux qui ont survécu à cet événement fâcheux. Les autres sont morts, donc fatalement, ils ne sont pas là pour témoigner. La nature les a éliminés, nous laissant avec les survivants. De là notre illusion que ce qui nous tue nous rend plus fort alors que parfois oui mais souvent non (on verra comment vous revenez d’un séjour en Sibérie si vous y survivez).
En revanche, ceux qui survivent renforcent l’espèce ou le système. Prenons un restaurant. Un restaurant est terriblement fragile. Il peut mourir à la moindre baisse de fréquentation. Mais Les restaurants, eux, ne sont pas fragiles. Ca n’arrivera jamais que tous les restaurants meurent. En revanche, la mort d’un restaurant renforce l’existence des autres restaurants (plus de clients pour les autres, apprentissages sur ce qui plaît ou pas, etc).
La mort d’une partie du système renforce le système.
C’est tout le sens de la devise Fluctuat nec mergitur (il flotte, ou il fluctue, mais ne sombre jamais).
Analyser les erreurs des autres nous aide à nous renforcer tant que nous ne sommes pas morts. Analyser les créateurs qui échouent, ou a minima leurs erreurs, nous enseigne bien plus qu’observer ceux qui réussissent.
Je rêve de lire un livre du style “tout ce qu’il faut faire pour échouer en tant que créateur”. Pourquoi ? Car, alors, il suffirait de ne pas faire ces erreurs pour forcément réaliser des actions neutres ou positives. Oui, c’est contre intuitif, mais c’est ainsi que fonctionne la nature, la connaissance et même l’amour (plutôt que de chercher quelqu’un qui possède tous vos traits idéaux, cherchez quelqu’un qui n’a pas tel red flag ou tel défaut que vous ne supportez pas — vous n’aurez alors que des partenaires sains pour vous).
La Not-To-Do-List
En passant par la négative, ou la Not To Do List, je gagne en sérénité et progresse plus vite. Les romains nommaient ça Via Negativa et Taleb montre les dangers de l’opposé, le Via Positiva — qu’il nomme “interventionnisme naïf” :
Considérons le besoin d’intervenir à tout prix par l’exemple. Dans les années 30, on présenta 389 enfants à des médecins new-yorkais; l’ablation des amygdales fut recommandée pour 175 d’entre-eux. Les 245 enfants restants furent de nouveau soumis à l’examen de médecins, et l’on recommanda à 99 d’entre eux l’opération chirurgicale. Lorsqu’on fit ausculter les 116 enfants restants à une troisième équipe de médecins, l’amygdalectomie fut encore recommandée à 52 d’entre-eux. […]
Cette histoire nous permet de voir le meurtre probabiliste à l’œuvre. Chaque enfant qui subit une opération superflue voit se réduire son espérance de vie. ~ Antifragile, P.139
L’inaction ou la suppression est souvent meilleure que l’action ou l’ajout. Pour être en meilleure forme, autant supprimer la bière, les gâteaux et les frites, plutôt que d’ajouter des compléments alimentaires.
Ma Not To Do List comporte des entrées comme :
Ne pas dormir moins de 6h deux jours de suite, passer deux jours de suite sans écrire pour moi, lire ce qui prend moins de 15 minutes à lire ou écouter les news (les importantes me parviendront)
Si je ne fais rien de tout ça, alors je n’ai pas à me prendre la tête sur ce que je fais, car ce que je fais est forcément bénéfique.
Mieux vaut des gros stress suivis d’une camomille qu’un stress chronique et des rendez-vous chez l’ostéopathe
D’expérience, nous savons qu’il y a des jours meilleurs que d’autres et qu’on organise plus de pique niques en juillet qu’en janvier. La nature et tous ses êtres sont intermittents — à l’inverse des machines.
Pourtant, notre organisation repose sur l’idée que tous les jours sont les mêmes. Prenons l’organisation du travail — de l’emploi, plutôt : 35h, minimum 5 jours par semaine toute la journée, avec quelques rares vacances en Espagne, et une « génération burnout » qui pète les plombs.
On nous prend, justement, pour des machines — comme nombre de ces gourous qui vous incitent à faire des review annuelles hyper poussées pour optimiser votre temps, à l’instar de Jean de la Rochebrochard et de son approche toxique de la “Human Machine”. Quelle bizarrerie. Quelle toxicité.
L’intermittence créative
En tant que créateurs.trices, nous savons bien que nous sommes intermittents : l’énergie créative n’est pas linéaire. Certains jours ça vient tout seul, d’autres sont plus professionnels : il faut se déter et discipliner notre curiosité maladive (entendre, notre tendance à s’éparpiller, défaut de la curiosité).
Nous sommes déconnectés de nous-même au profit des machines qui marchent H24 — comme les algorithmes ou le marché crypto. Pourtant, quand je regarde le mode de vie de créateurs géniaux, je réalise qu’ils sont tous :
Intermittents
Décalés du rythme du monde moderne
Un Simple coup d’oeil à cette image m’incite à trouver mon rythme, et à mélanger frugalité & « Fuck you money » :
L’intermittence de la nature
Historiquement, le travail était dicté par les saisons, à l’instar de l’agriculture :
L’hiver est consacré à l’entretien de la propriété et au labourage. C’est le travail de l’ombre qui permettra au printemps de bien se passer. Perso, je dédie cet hiver (T1 2022) à un travail business de fond (que vous pouvez suivre sur linkedin).
Le printemps est consacré à la plantation : semer, arroser et protéger les bourgeons pour les aider à grandir. Pour moi, ça sera le moment de lancer mon produit.
L’été consiste surtout à moissonner. La récolte annuelle se joue et avec elle, l’alimentation du foyer et de la société. Pour moi, ça sera le moment de perfectionner mon produit avec les retours clients et de réaliser un second lancement.
L’automne, c’est jachère : la récolte est terminée. On profite des efforts accomplis durant l’année et on anticipe le travail de fond hivernal. On verra d’ici là ce que ça sera pour moi, mais si tout se passe bien, je me réserve une surprise.
Je plaide donc pour une vie intermittente qui suive les rythmes naturels — les siens et ceux de la nature. Travailler dur en hiver, et naviguer pendant l’été.
L’intermittence biologique face à la vie moderne
La nature (et ses Hommes) aiment les pressions, mais pas tous les types de pressions. Je parie que nous ne gardez pas un bon souvenir de la pression du BAC ou de vos exams en général. C’est parce qu’il s’agit de pressions faibles mais chroniques (comme l’ombre d’un manager ou le remboursement d’un emprunt).
A l’inverse, nous préférons les pressions intenses suivies d’une période suffisante de repos.
Et ça, ça pose un problème pratique en tant qu’un humain du XXI qui vit en ville, qui doit gérer l’URSSAF, au milieu d’une pandémie gérée avec les pieds en plein dans le « siècle des menaces »8 : ce mode de vie nous surexpose aux rendez-vous chez l’ostéopathe parce qu’on a mal au dos de notre position au bureau et de notre anxiété légère mais chronique.
C’est pourquoi je m’efforce de me libérer de tous ces stresseurs chroniques que sont le métro, mon emprunt, les mauvais clients, un manager ou les anciens d’école de commerce.
L’intermittence du modèle économique
Si vous êtes salarié.e, vos revenus varient peu ou pas. Il semblerait que vous ayez une douce sécurité, contrairement aux indépendants dont les revenus sont plus volatiles (mais c’est une dangereuse illusion).
Trois points ici :
Mes revenus s(er)ont intermittents
Ils sont non-linéaires, donc potentiellement exponentiels
Je suis plus robuste en tant qu’indépendant que salarié (où j’étais fragile)
1. Je conçois ma vie pro de manière intermittente.
Certaines périodes de l’année (et certaines années) seront plus intenses que d’autres. Plus globalement, j’envisage ma carrière à la Carl Jung : des périodes d’études profondes ; d’autres de partage de son travail, de cours et de mondanités ; et à la Taleb : deux ans à amasser ma fuck you money, un an « à combler mes lacunes philosophiques et scientifiques pour travailler sur mes idées ».
Donc je construis ma vie pro pour respecter ma propre intermittence — ce qu’on appelle souvent “s’écouter”.
2. J’ai des optionalités positives.
Un salaire peut augmenter, mais il est capé. Selon votre métier et votre entreprise, il n’ira jamais au-dessus d’un plafond déterminé à l’avance, ni en-dessous d’une somme réglementaire.
En tant qu’indépendant, je peux gagner 0 comme 1 000 000 d’euros. Je m’expose à des optionalités positives : je risque de gagner moins au quotidien (je peux même faire mois à 0€), mais je n’ai aucune chance de perdre tout mes clients d’un coup — et j’ai une chance, si infime soit-elle, de gagner beaucoup d’un seul coup (comme lorsque j’ai vendu pour 600 000€ de CA en une seule nuit dans mon job précédent — oui, copywriter offre des optionalités positives, comme être artiste, mais pas en tant que salarié).
A l’inverse, en tant que salarié, je gagnais bien au quotidien, mais j’ai une chance de tout perdre d’un coup (licenciement) et je n’ai aucune chance de gagner beaucoup. A long terme, la prise de risque consiste à rester dans cette seconde zone.
3. En tant qu’indépendant, je capte les signaux faibles.
Je n’obtiens aucun rendez-vous client pendant 3 semaines ? Je dois changer ma manière de prospecter. Je n’en convertis aucun ? Je dois revoir la conduite de ces appels. Je subis de nombreux petits chocs qui me maintiennent en bonne santé et m’aident à progresser. Ces pressions sont des informations qui me solidifient.
A l’inverse, les salariés sont peu exposés aux conséquences de leurs actes. Dès que nos actions sont décorrélées des conséquences, nous ne subissons pas ces petits chocs salutaires, mais risquons de subir d’importants chocs (comme se faire licencier, ce qui ne peut pas m’arriver en tant qu’indépendant — mes clients ne pouvant pas tous me virer en même temps, même s’ils apprennaient tous que tout compte fait, j’aime bien Maitre Gims).
Aujourd’hui, mon intermittence s’articule entre 80% de mon temps sur des projets pros et 20% sur mes projets — mais j’œuvre à inverser la balance, sur le modèle de l’économie contributive (Ctrl F à “contributi”).
C’est cette histoire que j’espère vous narrer cette année.
Encore meilleurs voeux,
Bisous
& coeur avec des frangipanes
La pratique délibérée consiste à pratiquer ET avoir une pensée réflexive sur sa pratique, afin de progresser. Voir le papier scientifique.
La production en bronze de La Porte des Enfers est posthume.
Lien non-affilié, je pense juste que vous passerez un bon moment.
Greg Stemm est le co-fondateur de Odyssey Marin Exploration, entreprise spécialisée dans les explorations marines.
Le Lit de Procuste, Nassim Nicholas Taleb : Dans la mythologie grecque, Procuste avait la particularité de couper les membres des ses hôtes ou de les écarteler pour qu'ils rentrent dans le lit qu’il leur offrait.
Avant l’Aufklärung, l’individu n’était qu’une partie négligeable du système, comme une fourmie dans sa fourmilière. Le grand apport des Lumières, c’est de défendre que l’humain doit cultiver son intimité. Autrement dit, exister en tant qu’individu distinct du système. Plus là dessus dans ce fameux texte de Kant : Qu’est-ce que les lumières ?
Les vieux (de 25 ou 75 ans) qui sortent de telles dingueries sont souvent les mêmes qui trouvent étrange que je leur dise que si un président veut mener une guerre, il doit être en première ligne. Fracture de l’intelligence, quand tu nous tiens.